Qui est finalement récompensé par la loi dans le cas du recouvrement des prêts:moi ou mon débiteur?

Qui est finalement récompensé par la loi dans le cas du recouvrement des prêts:moi ou mon débiteur?

1.Qu’est-ce que signifie initialement le terme?

Ce terme désigne le comportement d’un débiteur qui, dans le but de nuire aux intérêts de ses créanciers et de contrecarrer leur satisfaction de ce qu’ils recevraient normalement de lui, transfère à un tiers la prestation due. Cela se produit lorsque vient le moment où la prestation envers les créanciers devient exigible et qu’ils exécutent alors forcément leur créance contre le débiteur, qui n’aura plus l’objet dû en sa possession, laissant ainsi les créanciers « sans protection » s’il n’y avait pas de recours en fraude.

Dans de tels cas, les créanciers ne pourraient pas réclamer la prestation due ni au débiteur, puisqu’elle ne serait plus entre ses mains, ni au tiers à qui la prestation a été transférée, car celui-ci aurait apparemment acquis la propriété de l’objet. Pour empêcher de tels comportements frauduleux dans la pratique, le législateur accorde au créancier qui cherche à sécuriser sa créance contre le débiteur, l’action paulienne, afin que celui-ci puisse annuler le transfert de l’objet du débiteur au tiers comme frauduleux et que l’objet « revienne » ainsi entre les mains du débiteur, duquel le créancier pourra le récupérer.

2.Quelles sont les conditions légales?

Pour qu’une action paulienne soit définie, elle doit contenir les éléments suivants :

  • Être engagée par un créancier du débiteur.
  • Le débiteur effectue un transfert/modification/chargement de ses droits de propriété.
  • Le précédent élément se fait dans l’intention de nuire aux créanciers (peu importe si le débiteur poursuit d’autres objectifs).
  • Le tiers auquel la prestation est transférée doit être conscient de l’intention du débiteur de nuire à ses créanciers.
  • Le reste de la propriété du débiteur ne suffit pas à satisfaire les créanciers.

3.Y a-t-il des exceptions?

Lorsque nous parlons de cession, nous entendons toute transmission/modification/charge d’un droit de propriété entreprise par le débiteur dans le but de nuire à ses créanciers. Ainsi, selon ce qui précède, ne sont pas soumises à la paulienne :

  • Lorsque le débiteur renonce à un héritage/donation.
  • Lorsque le débiteur omet d’accepter une donation d’une tierce personne.
  • Lorsque le débiteur conclut des contrats prometteurs : il déclare simplement qu’il remplira la prestation envers une tierce personne, sans lui livrer pour autant l’objet.

Dans ces cas, l’intention du législateur est claire : personne ne peut être « punie » par la loi pour avoir omis de recevoir un avantage, car cela limiterait excessivement sa liberté. Ce qui importe, c’est que le débiteur n’épuise pas sans cesse son patrimoine alors qu’il a des obligations envers ses créanciers, qu’il doit remplir.

4.Comment puis-je me protéger?

Dans le cas où le créancier a des soupçons légitimes que le débiteur ne remplira pas la prestation envers lui, car il agit de manière dolosive, il peut intenter ce qu’on appelle une « action en paulienne » ou « action de fraude ». Cette action vise précisément à annuler le transfert d’un élément du patrimoine du débiteur à un tiers, car cela a été fait pour nuire aux intérêts du créancier.

Pour que l’action soit définie, le créancier doit :

  • Connaître l’identité du tiers et le nommer dans son action.
  • Décrire clairement la relation juridique qui le lie au débiteur et qui justifie la demande de prestation qu’il a contre lui.

Par exemple : A a prêté de l’argent à B et, pour garantir le remboursement du prêt, a pris une hypothèque sur un bien immobilier de B. Si B ne rembourse pas le prêt à A et que ce dernier lance une vente aux enchères de l’immobilier, il est possible que, pendant le processus judiciaire, B ait déjà transféré l’immobilier à un tiers, C. Ainsi, A, qui souhaite maintenant liquider l’immobilier pour être indemnisé de la vente aux enchères, peut intenter une action en paulienne contre B et C et décrire en détail le contrat de prêt conclu avec B, ainsi que l’hypothèque sur la propriété de ce dernier, dont il a maintenant le droit de satisfaction.

5.Est-ce aussi un crime?

Selon l’article 397 du Code pénal, la fraude aux créanciers :

  • Constitue un crime et plus précisément un délit.
  • Est punie d’une peine de prison allant jusqu’à 2 ans ou d’une amende.
  • Est également punie lorsque le débiteur transfère un élément de son patrimoine pour un prix très bas en fonction des règles de la logique.
  • Si le préjudice causé au créancier est particulièrement important (environ plus de 10 000 euros), alors l’auteur est puni d’une peine d’emprisonnement d’au moins 2 ans, accompagnée d’une amende.
  • Une peine similaire est prévue pour le tiers qui participe avec le débiteur en sachant que le transfert porte préjudice à ses créanciers.

6.Quand la réclamation est-elle prescrite?

La réclamation du créancier pour l’exercice de l’action paulienne, afin de demander l’annulation du transfert entre le débiteur et un tiers, est prescrite après 5 ans à compter de la date du transfert (cession). Ainsi :

  • Le délai de prescription commence à partir d’un point temporel fixe (la réalisation du transfert).
  • Il n’importe pas quand le créancier a appris la cession.
  • Si plusieurs créanciers du débiteur existent, la prescription « court » pour tous à partir du même point temporel.
  • La réclamation pénale pour l’action paulienne a également une prescription de 5 ans, donc il n’y a pas de différenciation et les deux réclamations seront prescrites le même jour.

7.Quand la connaissance du tiers n’est-elle pas requise?

La règle pour qu’une action paulienne soit admise est que le créancier doit prouver que le tiers connaissait l’intention du débiteur de nuire à ses créanciers en lui transférant un élément de son patrimoine. S’il ne le prouve pas, l’action sera rejetée comme étant fondée sur un motif non valable. Cependant, il existe une exception à cette règle, lorsque la connaissance du tiers de l’intention préjudiciable des créanciers n’est pas requise si le tiers est :

  • Le conjoint du débiteur.
  • Un parent du débiteur en ligne directe (c’est-à-dire le père, la mère, et ainsi de suite jusqu’au grand-père/grand-mère du débiteur).
  • Un parent du débiteur jusqu’au 3e degré (c’est-à-dire frère/sœur, neveu/nièce du débiteur, avec la parenté allant jusqu’au cousin au 3e degré).
  • Un parent du débiteur jusqu’au 2e degré par alliance (c’est-à-dire jusqu’au neveu/nièce de son conjoint).
  • Si le tiers a reçu le transfert du débiteur sans contrepartie, il n’est pas nécessaire qu’il connaisse l’intention préjudiciable.

Pour les cas ci-dessus, la loi considère que ces personnes connaissent l’intention préjudiciable des créanciers recherchée par le débiteur en transférant le bien à ceux-ci. Par conséquent, le créancier n’aura pas besoin de prouver l’intention préjudiciable dans son action, mais au contraire, ces personnes devront prouver qu’elles ne connaissaient pas l’intention préjudiciable du débiteur au moment du transfert. Cependant, il est crucial de noter que le délai mentionné cesse de courir si l’action en paulienne n’est pas engagée dans l’année suivant le transfert.

8.Quels sont les résultats de la paulienne?

Le résultat principal de l’admission de l’action paulienne par le tribunal est que le tiers doit restituer au débiteur le bien qu’il a reçu de lui, en substance rétablir la situation dans son état antérieur, ce qui dépend des circonstances.

Par exemple, si le débiteur a transféré à un cousin l’immeuble grevé d’une hypothèque en faveur de la banque, alors avec l’acceptation de l’action paulienne par le tribunal, le cousin sera obligé de restituer l’immeuble au débiteur = rédiger un acte notarié et transcrire le nouvel acte au bureau des hypothèques/cadastre. Les frais supportés par le cousin ne peuvent pas être réclamés au créancier qui a obtenu l’admission de l’action, en particulier si le cousin était au courant de l’intention préjudiciable du débiteur.

Il est très important de noter que l’action paulienne qui a été admise ne favorise que le créancier qui l’a intentée et aucun autre créancier. Par exemple, si trois banques avaient enregistré une hypothèque sur le même bien, seule la première banque dont l’action a été admise sera considérée comme étant le créancier principal du bien. Les autres banques devront engager chacune une action distincte pour obtenir l’annulation du transfert du bien au tiers.

9.Et si le tiers transfère la prestation à un autre?

Dans ce cas, lorsque le tiers à qui le débiteur a transféré la prestation transfère à son tour la prestation à un autre (quatrième), pour que le créancier puisse agir contre le quatrième et annuler le transfert, les conditions suivantes doivent être remplies :

  • Le quatrième doit avoir eu connaissance de l’intention du tiers de nuire également au créancier initial lorsqu’il lui a transféré la prestation.
  • Dans le cas où le quatrième est lié au débiteur par l’une des relations mentionnées à la question 7, alors sa connaissance est présumée et il n’est pas nécessaire de la prouver.
  • Il est également nécessaire qu’une action paulienne soit intentée dans l’année suivant le transfert de la prestation.
  • Il est important de noter que si le tiers transfère la prestation au quatrième sans contrepartie, alors la connaissance de l’intention préjudiciable n’est pas requise pour le quatrième et n’a pas besoin d’être prouvée.

10.Comment le tiers qui a reçu la prestation gratuitement et sans connaissance est-il responsable?

Il n’est pas rare dans la pratique que le débiteur transfère la prestation à un tiers sans contrepartie / par pur acte de générosité. Cela se produit généralement pour que le transfert soit considéré comme un don et reste ainsi valide, contournant les dispositions de la loi sur la fraude aux créanciers. Dans un tel cas, nous devons faire la distinction suivante :

  • En règle générale, comme nous l’avons dit, lorsque le débiteur transfère la prestation à un tiers par pure générosité, la loi n’exige pas que le tiers connaisse l’intention préjudiciable.
  • Si le tiers connaissait l’intention préjudiciable du débiteur au moment du transfert, alors le transfert sera annulé et le tiers sera obligé de restituer la prestation au débiteur.
  • Si le tiers n’était pas au courant de l’intention préjudiciable (c’est-à-dire qu’il était de bonne foi), alors il est responsable uniquement selon les dispositions sur l’enrichissement injustifié, c’est-à-dire que l’enrichissement / avantage tiré de la prestation doit être restitué entre les mains du tiers pendant le temps où le créancier se retournera contre lui en justice.

 

Ce qui précède s’applique également dans le cas où le tiers transfère la prestation à un quatrième, un cinquième, etc., sans distinction.