La prescription en droit :Jusqu’à quand pouvez-vous faire valoir vos droits?

La prescription en droit :Jusqu’à quand pouvez-vous faire valoir vos droits?

1.Que signifie exactement le terme?

Lorsque nous utilisons l’expression « la créance est prescrite », cela signifie qu’un laps de temps suffisant, reconnu par la loi, s’est écoulé, après lequel le droit est affaibli et ne peut donc plus être exercé en justice ou extrajudiciairement. Cela signifie que celui qui doit fournir (par exemple, le débiteur dans un contrat de prêt) a le droit de refuser de fournir (de rembourser le prêt) en invoquant l’exception de prescription. Il est important de noter que si le débiteur ignore que la créance du créancier est prescrite et fournit néanmoins la prestation, il n’est pas poursuivi. Il en va de même s’il sait que le droit est prescrit et fournit malgré tout la prestation.

2.Quelle est la règle pour la prescription ?

La règle en droit civil concernant la prescription est que les créances sont prescrites 20 ans après leur naissance. Ce délai est complet, c’est-à-dire qu’il n’exclut pas les samedis et les jours fériés. De plus, la prescription nécessite que la créance de son titulaire soit née et qu’il soit possible de la poursuivre en justice (= qu’elle soit certaine, liquidée, exempte de contestations/délais dilatoires).

Il est également crucial de savoir que la prescription commence le lendemain du jour où la créance est née. Par exemple, si quelqu’un me cause un dommage le 15/6/2023, la créance en dommages-intérêts que j’ai contre lui commence à être prescrite à partir du 16/6/2023.

3.Y a-t-il des exceptions?

Il existe des exceptions à la règle ci-dessus pour certaines catégories de créances, qui sont soumises à une prescription de 5 ans par la loi. Celles-ci sont mentionnées à l’article 250 du Code civil et comprennent notamment :

  • Les commerçants/artisans.
  • Les transporteurs de personnes.
  • Les hôteliers/aubergistes.
  • Les avocats/notaires/huissiers de justice.

Cette liste comprend plusieurs catégories professionnelles, il serait donc utile de la consulter. Les dispositions du droit des assurances (pour les créances contre l’assureur), du droit du travail (pour la réclamation de salaire contre l’employeur), etc., établissent également des prescriptions abrégées.

4.Que signifie exactement le terme « suspension » de la prescription?

Lorsque nous parlons de la suspension de la prescription, nous entendons qu’il existe des motifs légaux considérés par la loi comme suffisants pour empêcher la prescription de continuer. Pendant toute la durée de cette situation, la prescription ne peut pas se poursuivre, elle est donc considérée comme « gelée ». La prescription est suspendue :

  • Entre époux pendant la durée du mariage/de l’union de fait, tant que celle-ci dure.
  • Entre parents et enfants tant que ces derniers sont mineurs.
  • Entre tuteurs et personnes sous tutelle, pendant toute la durée de cette dernière.
  • Entre employeurs et employés aussi longtemps que dure la relation de travail (mais pas plus de 15 ans).

Parallèlement, si au cours des six derniers mois de la période de prescription, l’un des événements suivants se produit :

  • Si le bénéficiaire a été empêché par la fermeture des tribunaux ou par une autre force majeure d’exercer sa créance.
  • Si le débiteur a frauduleusement empêché le bénéficiaire d’exercer sa créance.

Alors, dans ce cas également, la prescription sera suspendue et ne pourra en aucun cas être complétée avant qu’il ne se soit écoulé six mois depuis la fin de la raison qui a provoqué la suspension (par exemple, si les tribunaux ont cessé de fonctionner le 10/3/2020 en raison du coronavirus, et ont repris leur activité le 20/5/2020, alors si j’avais une créance qui se trouvait dans les six derniers mois de la prescription, celle-ci ne pourrait pas être prescrite avant le 20/11/2020).

5.Et concernant le terme « interruption »?

Ce terme spécifique signifie que lorsque survient le motif d’interruption, le temps de prescription qui avait commencé  jusqu’à présent n’est pas pris en compte, ce qui a pour effet de recommencer la prescription de la créance depuis le début. Pour que cela se produise, il doit y avoir une raison légale d’interruption, telle que :

  • Lorsque le débiteur reconnaît la créance (du créancier) de quelque manière que ce soit.
  • Lorsque le créancier intente une action en justice contre le débiteur pour satisfaire sa créance (même une demande de mesures conservatoires).
  • Lorsque le créancier remet un titre exécutoire au débiteur.
  • Lorsque le débiteur fait faillite et que le créancier est notifié de sa faillite (afin de recevoir également un montant des actifs liquides).
  • Lorsque le créancier soulève une objection de compensation contre une créance que le débiteur a contre lui (dans le cas où l’un doit de l’argent à l’autre).

6.Les objections sont-elles prescrites?

Il est une règle fondamentale en droit civil selon laquelle l’objection à laquelle chaque partie a droit ne se prescrit pas, contrairement aux créances. Cela signifie que si je dois à quelqu’un une somme d’argent (issu d’un contrat de prêt, par exemple) et que j’ai une créance correspondante contre lui issue d’une autre relation juridique (comme le prix de vente non encore payé), alors je suis toujours en droit d’invoquer à son encontre l’objection de compensation pour la créance que j’ai contre lui, afin qu’il y ait une compensation entre les créances qui se chevauchent.

7.Quelle est la différence entre la prescription et le délai extinctif?

Dans de nombreux contrats, les parties fixent parfois elles-mêmes un délai dans le but de permettre l’exercice du droit prévu dans le contrat. Par exemple, il est stipulé (art. 508 du Code civil) que celui qui a fait une donation à quelqu’un peut la révoquer dans les 5 ans à compter de la date de la donation si, de son vivant, le donateur est encore en vie ou après sa mort, un enfant légitime est né de lui ou un autre de ses enfants est devenu légitime par le mariage de ses parents. Dans cet exemple, le délai de 5 ans est appelé délai extinctif car il impose l’exercice du droit (de naître et) d’être exercé. Les différences entre le délai extinctif et la prescription sont les suivantes :

  • Le délai extinctif est pris en compte d’office par le tribunal et n’a pas à être invoqué comme la prescription (il n’y a donc pas de risque qu’il soit ignoré)
  • Si le délai extinctif expire sans que le droit soit exercé, alors le droit et la créance sont définitivement perdus (dans la prescription, la créance continue d’exister mais le créancier n’est pas contraint de l’exercer).

8.Si j’ai une créance civile et pénale?

Il n’est pas rare en pratique qu’un événement réel tombe sous le coup de plusieurs lois. Prenons l’exemple où quelqu’un vole ma voiture de grande valeur. Dans ce cas, j’ai une créance (civile) contre lui pour indemnisation = pour récupérer ma voiture ou pour être indemnisé de sa valeur en argent si la restitution n’est pas possible. En même temps, j’ai aussi une créance pénale pour porter plainte contre l’auteur pour qu’il soit poursuivi et puni pénalement. Donc ici, il y a une convergence de créances, car les deux créances que j’ai visent des résultats différents.

En ce qui concerne la prescription, la créance d’indemnisation du droit civil est prescrite en 5 ans à partir du moment où j’ai eu connaissance du dommage ou en 20 ans à partir du moment où l’infraction a été commise (dans ce cas, le vol). La criminalité de vol, en revanche, est prescrite en 20 ans en raison de la grande valeur de la voiture volée (par exemple, plus de 120 000 euros), le vol étant une forme de criminalité. Ainsi, dans ce cas, la prescription plus longue de 20 ans de la créance pénale prévaudra et s’appliquera également à la créance civile. Ce qui précède constitue la règle qui s’applique en cas de convergence de créances civiles et pénales uniquement lorsque la créance pénale a une prescription plus longue que la créance civile, ce qui fera prévaloir la prescription de cette dernière.

9.J’ai intenté une action en justice et elle a été rejetée comme irrecevable. Et maintenant?

Le législateur, voyant ce phénomène se développer malheureusement dans la pratique, c’est-à-dire le rejet de l’action en justice d’un avocat pour des erreurs formelles, a introduit la règle d’assistance suivante :

  • Tout d’abord, l’introduction d’une action en justice en tant qu’acte interrompt la prescription de la créance (ce qui est très utile lorsque les délais de prescription sont proches).
  • Si l’action en justice est rejetée pour des raisons formelles, et que le demandeur introduit à nouveau une nouvelle action dans les 6 mois suivant le rejet de la dernière action, alors la prescription est réputée avoir déjà été interrompue par la précédente action en justice.

Ainsi, si la prescription devait se terminer le 10/01/2024 et que l’action en justice a été introduite le 02/06/2023, et a été rejetée comme irrecevable pour des raisons formelles, si l’avocat concerné introduit à nouveau une action en justice avant le 02/12/2023, alors la prescription sera réputée avoir été interrompue dès le 02/06/2023.

10.Si ma créance issue de la vente est prescrite, y a-t-il une alternative?

Dans le cas où l’une des deux parties ne prend pas les mesures nécessaires pour exercer en temps voulu ses créances et que ces dernières tombent en prescription, il n’est pas exclu que la créance d’enrichissement sans cause soit utile, celle-ci étant toujours subsidiaire par rapport à la créance principale découlant de la relation juridique de base. Ainsi, par exemple, dans le contrat de vente, le droit de l’acheteur en raison de la non-conformité de la chose au contrat, notamment pour un bien meuble, est prescrit après 2 ans. Si la créance de l’acheteur pour la restitution est prescrite, il peut alors invoquer la créance d’enrichissement sans cause, qui a un délai de prescription de 20 ans. Bien sûr, dans un tel scénario, il devra prouver que les conditions de l’enrichissement sans cause sont remplies, c’est-à-dire que le vendeur, en ne fournissant pas une chose conforme à l’acheteur, a réalisé une économie, etc.

À côté du client et de ses besoins.
Athina Kontogianni-Avocate

 

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